Dans son article « Et si la Belgique avait colonisé le Burundi », Monsieur l’Ambassadeur Tharcisse NTAKIBIRORA nous dit :
« La tutelle belge a financé à profusion des partis politiques Hutu et organisé un Front Commun de partis politiques à obédience Hutu au Burundi en vue de barrer la route du Parti pro-indépendantiste de l’Unité et du progrès national (UPRONA)fondé par le Prince Louis Rwagasore en 1958 »
Décidément la Belgique est accusée de tous les maux !!
Montre z-nous au moins une preuve que la Belgique a financé les partis politiques Hutu. Ou dites-nous lesquels.
Que la Belgique ait souhaité retarder l’indépendance, c’est indéniable. Mais elle n’a pas organisé comme vous le dites « le Front Commun des partis à obédience Hutu », car il n’y avait qu’un seul grand parti hutu, le PP dans ce fameux Front qui arrangeait en fait les frères Ntidendereza et Biroli.
Pour ceux qui ont oublié certains détails, voici un petit historique.
Dès la fin des années 1960, dans ce contexte de démocratisations des institutions imposé par l’ONU, on assiste à un foisonnement des idées et des revendications politiques.
En juin 1959, a été abrogé le décret de 1929 que réglementait le droit d’association, ce qui engendra la création de nombreux partis politiques.
En effet, depuis le milieu des années 1950, les associations indigènes telles que les syndicats ou les coopératives étaient de plus en plus actives et demandaient de participer à la gestion des affaires politiques.
On peut donc dire que la naissance des partis politiques burundais est intervenue dans un contexte de démocratisation des institutions à l’approche d’échéances électorales, en liaison avec l’accroissement des responsabilités des associations indigènes.
Ainsi, de nombreux partis politiques sont nés juste avant les élections communales de 1960.
On ne compte pas moins de 27 partis politiques dont les quatre plus importants sont :
- L’UPRONA (Unité et Progrès National),
- Le PDC (Parti Démocrate Chrétien),
- Le PDR (Parti Démocratique Rural),
- Le PP (Parti du Peuple).
Parmi les autres partis, il faut citer entre autres :
- Le MPB (Mouvement Progressiste du Burundi),
- L’UPD (Union Démocratique Paysanne),
- La VPM (Voix du Peuple Murundi),
- L’AB (Amajambere y’iBurundi),
- Le PEP (Parti de l’Emancipation Populaire),
- Le DNB (Démocratie Nationale au Burundi),
- Le RPB (Rassemblement Populaire du Burundi),
- Le MRB (Mouvement Rural du Burundi),
- Le RTB (Rassemblement des Travailleurs du Burundi)à,
- Le PDJB (Parti Des Jeunes Travailleurs du Burundi),
- Le PC (Parti Conservateur),
- L’UNARU (Union Nationale du Rwanda-Urundi),
- L’UHTTB (Union Hutu Tutsi Twa du Burundi).
Ces partis, trop nombreux, ont vite compris que pour être le plus performant possible, il fallait qu’ils se regroupent en « cartels ».
Ainsi cinq cartels se sont formés.
Le cartel des partis démocrates et monarchistes. Né le 30 juillet 1960. Derrière l’UPRONA, des rangent le DNB, le PDJT, le PC, le VMP, le AB.
Le cartel Ijwi ry’Amajambere y’Abasanzwe. Apparaît en août 1960. Il regroupe le PP, le MPB, le PEP, le VMP.
Le Front Commun Populaire, communément appelé Front Commun (FC).
Apparaît vers le 15 octobre 1960, juste avant les élections.
C’est le cartel le plus important.
Derrière le PDC, se rangent le PP, le PDR, les plus importants). S’y greffent le MPB, le UDP, le VMP, le AB, le PEP, le UNB, le RPB, le MRB, le RTB.
Il est composé en tout de 12 partis. Le FC réunissait des partis à idéologie populaire et démocrate. Il avait pour but principal de combattre et battre l’UPRONA. Le FC était proche de l’administration coloniale. En effet, contrairement à l’UPRONA, il n’était pas favorable à une décolonisation immédiate. C’était une alliance à visée électoraliste, car, elle a pris fin à la suite des élections.
Le cartel Amaraso Rusangi ou cartel du peuple.
Ce cartel fut entendu pendant quelques semaines en novembre 1960. Un document circulait pendant cette période faisant état d’une alliance entre l’UPRONA, MPB, UPD, DNB, PDR, PDJTB, UNB, PC, PTB, TRB… Il fut considéré comme une rumeur.
Le cartel Union des Partis Populaires (UPP).
Ce cartel voulait regrouper derrière le PP, le VPM, le UNB, le RBP, le UPROHUTU (qui n’était qu’une aile dure du PEP, lequel était une aile dure du PP).
Né en mars 1961, trois mois après les élections communales. Il était en fait un sous-groupe du FC.
Il drainait les mécontents des grands partis dits féodaux (PDR, PDC entre autres). Il réclamait une large accession des hutu aux hautes fonctions administratives.
En réalité, les partis importants n’étaient que quatre.
L’UPRONA est un parti politique monarchiste et nationaliste, dont son fondateur est le Prince Louis RWAGASDORE (du clan des BEZI). Il a été créé en 1958 à MURAMVYA. Ses statuts sont sortis 1959. Il prône une indépendance totale et immédiate, sous la direction du mwami et dans un contexte de multipartisme.
Le PP est le deuxième parti politique de l’époque. Il a été créé le 10 janvier 1960, et fut agréé le 4 février 1960.
Il redoutait une indépendance immédiate qui aurait renforcé davantage le pouvoir féodal pour continuer à dominer le peuple.
Le PP se voulait de regrouper les hutu et les simples tutsi. Mais beaucoup de tutsi n’ont pas adhéré car trop dépendants des féodaux, les ganwa, qui étaient majoritairement dans l’UPRONA, le PDC ou le PDR. Le PP était donc grand majoritairement hutu.
Le PDC est le troisième grand parti des années 1960. Fondé par les frères Joseph BIRORI et Jean Baptiste NTIDENDEREZA, les deux fils du chef Pierre BARANYANKA (clan des BATARE).
Le PDC estimait avec l’administration coloniale qu’il n’était pas encore temps d’accéder à l’indépendance, et était aussi d’accord que le roi (MWAMBUTSA) et sa famille (spécialement son fils RWAGASORE) du clan des BEZI, devaient rester en dehors des partis politiques.
Le PDR est le 4ème important parti de cette période. Il a été créé par le chef Pierre BIGAYIMPUNZI, cousin du mwami MWAMBUTSA.
Avant les élections communales, en voyant l’effervescence populaire qu’impulse l’UPRONA, de la part de son affiliation avec la royauté, l’administration coloniale de peur que ce parti ne remporte les élections, mit en place un décret qui interdit aux parents et alliés du mwami, de s’occuper de la politique. Avec ce décret, l’UPRONA se voyait privé pour les élections, de grands leaders charismatiques tels le Prince RWAGASORE, et des deux gendres du mwami, NDENZAKO et MUHIRWA.
Fait important : ces élections du 15 novembre 1961, élections communales sont « au suffrage universel direct masculin » (auxquelles ne participent que les hommes) ;
Elles sont remportées par le Front Commun (FC), proche de la tutelle. Le FC remporte avec 2873 sièges. Il rafle près de 70% des sièges des conseillers communaux !!
Répartition des conseillers communaux et bourgmestres (responsables de la commune en Belgique, équivalent de Maires en France) parti par parti.
« La tutelle belge a financé à profusion des partis politiques Hutu et organisé un Front Commun de partis politiques à obédience Hutu au Burundi en vue de barrer la route du Parti pro-indépendantiste de l’Unité et du progrès national (UPRONA)fondé par le Prince Louis Rwagasore en 1958 »
Décidément la Belgique est accusée de tous les maux !!
Montre z-nous au moins une preuve que la Belgique a financé les partis politiques Hutu. Ou dites-nous lesquels.
Que la Belgique ait souhaité retarder l’indépendance, c’est indéniable. Mais elle n’a pas organisé comme vous le dites « le Front Commun des partis à obédience Hutu », car il n’y avait qu’un seul grand parti hutu, le PP dans ce fameux Front qui arrangeait en fait les frères Ntidendereza et Biroli.
Pour ceux qui ont oublié certains détails, voici un petit historique.
Dès la fin des années 1960, dans ce contexte de démocratisations des institutions imposé par l’ONU, on assiste à un foisonnement des idées et des revendications politiques.
En juin 1959, a été abrogé le décret de 1929 que réglementait le droit d’association, ce qui engendra la création de nombreux partis politiques.
En effet, depuis le milieu des années 1950, les associations indigènes telles que les syndicats ou les coopératives étaient de plus en plus actives et demandaient de participer à la gestion des affaires politiques.
On peut donc dire que la naissance des partis politiques burundais est intervenue dans un contexte de démocratisation des institutions à l’approche d’échéances électorales, en liaison avec l’accroissement des responsabilités des associations indigènes.
Ainsi, de nombreux partis politiques sont nés juste avant les élections communales de 1960.
On ne compte pas moins de 27 partis politiques dont les quatre plus importants sont :
- L’UPRONA (Unité et Progrès National),
- Le PDC (Parti Démocrate Chrétien),
- Le PDR (Parti Démocratique Rural),
- Le PP (Parti du Peuple).
Parmi les autres partis, il faut citer entre autres :
- Le MPB (Mouvement Progressiste du Burundi),
- L’UPD (Union Démocratique Paysanne),
- La VPM (Voix du Peuple Murundi),
- L’AB (Amajambere y’iBurundi),
- Le PEP (Parti de l’Emancipation Populaire),
- Le DNB (Démocratie Nationale au Burundi),
- Le RPB (Rassemblement Populaire du Burundi),
- Le MRB (Mouvement Rural du Burundi),
- Le RTB (Rassemblement des Travailleurs du Burundi)à,
- Le PDJB (Parti Des Jeunes Travailleurs du Burundi),
- Le PC (Parti Conservateur),
- L’UNARU (Union Nationale du Rwanda-Urundi),
- L’UHTTB (Union Hutu Tutsi Twa du Burundi).
Ces partis, trop nombreux, ont vite compris que pour être le plus performant possible, il fallait qu’ils se regroupent en « cartels ».
Ainsi cinq cartels se sont formés.
Le cartel des partis démocrates et monarchistes. Né le 30 juillet 1960. Derrière l’UPRONA, des rangent le DNB, le PDJT, le PC, le VMP, le AB.
Le cartel Ijwi ry’Amajambere y’Abasanzwe. Apparaît en août 1960. Il regroupe le PP, le MPB, le PEP, le VMP.
Le Front Commun Populaire, communément appelé Front Commun (FC).
Apparaît vers le 15 octobre 1960, juste avant les élections.
C’est le cartel le plus important.
Derrière le PDC, se rangent le PP, le PDR, les plus importants). S’y greffent le MPB, le UDP, le VMP, le AB, le PEP, le UNB, le RPB, le MRB, le RTB.
Il est composé en tout de 12 partis. Le FC réunissait des partis à idéologie populaire et démocrate. Il avait pour but principal de combattre et battre l’UPRONA. Le FC était proche de l’administration coloniale. En effet, contrairement à l’UPRONA, il n’était pas favorable à une décolonisation immédiate. C’était une alliance à visée électoraliste, car, elle a pris fin à la suite des élections.
Le cartel Amaraso Rusangi ou cartel du peuple.
Ce cartel fut entendu pendant quelques semaines en novembre 1960. Un document circulait pendant cette période faisant état d’une alliance entre l’UPRONA, MPB, UPD, DNB, PDR, PDJTB, UNB, PC, PTB, TRB… Il fut considéré comme une rumeur.
Le cartel Union des Partis Populaires (UPP).
Ce cartel voulait regrouper derrière le PP, le VPM, le UNB, le RBP, le UPROHUTU (qui n’était qu’une aile dure du PEP, lequel était une aile dure du PP).
Né en mars 1961, trois mois après les élections communales. Il était en fait un sous-groupe du FC.
Il drainait les mécontents des grands partis dits féodaux (PDR, PDC entre autres). Il réclamait une large accession des hutu aux hautes fonctions administratives.
En réalité, les partis importants n’étaient que quatre.
L’UPRONA est un parti politique monarchiste et nationaliste, dont son fondateur est le Prince Louis RWAGASDORE (du clan des BEZI). Il a été créé en 1958 à MURAMVYA. Ses statuts sont sortis 1959. Il prône une indépendance totale et immédiate, sous la direction du mwami et dans un contexte de multipartisme.
Le PP est le deuxième parti politique de l’époque. Il a été créé le 10 janvier 1960, et fut agréé le 4 février 1960.
Il redoutait une indépendance immédiate qui aurait renforcé davantage le pouvoir féodal pour continuer à dominer le peuple.
Le PP se voulait de regrouper les hutu et les simples tutsi. Mais beaucoup de tutsi n’ont pas adhéré car trop dépendants des féodaux, les ganwa, qui étaient majoritairement dans l’UPRONA, le PDC ou le PDR. Le PP était donc grand majoritairement hutu.
Le PDC est le troisième grand parti des années 1960. Fondé par les frères Joseph BIRORI et Jean Baptiste NTIDENDEREZA, les deux fils du chef Pierre BARANYANKA (clan des BATARE).
Le PDC estimait avec l’administration coloniale qu’il n’était pas encore temps d’accéder à l’indépendance, et était aussi d’accord que le roi (MWAMBUTSA) et sa famille (spécialement son fils RWAGASORE) du clan des BEZI, devaient rester en dehors des partis politiques.
Le PDR est le 4ème important parti de cette période. Il a été créé par le chef Pierre BIGAYIMPUNZI, cousin du mwami MWAMBUTSA.
Avant les élections communales, en voyant l’effervescence populaire qu’impulse l’UPRONA, de la part de son affiliation avec la royauté, l’administration coloniale de peur que ce parti ne remporte les élections, mit en place un décret qui interdit aux parents et alliés du mwami, de s’occuper de la politique. Avec ce décret, l’UPRONA se voyait privé pour les élections, de grands leaders charismatiques tels le Prince RWAGASORE, et des deux gendres du mwami, NDENZAKO et MUHIRWA.
Fait important : ces élections du 15 novembre 1961, élections communales sont « au suffrage universel direct masculin » (auxquelles ne participent que les hommes) ;
Elles sont remportées par le Front Commun (FC), proche de la tutelle. Le FC remporte avec 2873 sièges. Il rafle près de 70% des sièges des conseillers communaux !!
Répartition des conseillers communaux et bourgmestres (responsables de la commune en Belgique, équivalent de Maires en France) parti par parti.
PARTIS
|
CONSE3ILLERS COMMUNAUX (2873)
|
BOURGMESTRES (181)
|
PDC (FC)
|
925
|
56
|
UPRONA
|
545
|
36
|
PDR (FC)
|
501
|
29
|
PP (FC)
|
22
|
16
|
UNB (FC)
|
156
|
12
|
RPB (FC)
|
109
|
11
|
MRB (FC)
|
40
|
4
|
MPB (FC)
|
32
|
2
|
AB
|
13
|
0
|
VPM
|
12
|
1
|
UHTTB
|
10
|
0
|
UNARU
|
6
|
0
|
PTB
|
4
|
1
|
PEP (FC)
|
4
|
0
|
PC
|
1
|
0
|
Indépendants
|
293
|
13
|
Il comprend 60 membres spécialement du PDC (de BIRORI et son frère NTIDENDEREZA). On y retrouve 4 de l’UPRONA et 5 du PP. Les hutus du PP se sentent marginalisés dans ce FC dont ils sont une composante capitale par la population qu’ils sont censés représenter !! La fracture hutu-tutsi ne fait que commencer !!
Elle va s’aggraver à l’assassinat du prince RWAGASORE. Tout le monde s’attend à ce qu’il soit remplacé comme premier ministre par son vice premier ministre NGENDANDUMWE. Eh non ! Le roi et son entourage ne veulent pas d’un Hutu Premier Ministre ! Et la saga Hutu-Tutsi ne fait que commencer. Elle va encore s’accentuer avec l’assassinat de NGENDANDUMWE, le refus en 1965, par le roi, oui, encore lui, de reconnaître le parlement (Sénat et Assemblée) parce que majoritairement hutu !
Avec le respect alors Monsieur l’Ambassadeur, s’en chercher à couvrir qui que ce soit, attendons tranquillement les conclusions de la vérité par la CVR.
Isidore Nkunzumwami
C'est positif cette ouverture des débats, j'espère que nos jeunes burundais peuvent lire tous ces articles. Je suis parent burundais et quand j'entends les questions que me posent mes grands enfants, je me dis qu'il y a un problème, nous avons besoin d'une "vraie histoire du Burundi" or à ce jour chaque "historien " ou connaisseur de l'histoire raconte en fonction de son ethnie c'est dommage...mais ces débats contradictoires peuvent aider ...pour ceux qui veulent partir de quelque chose pour creuser.
RépondreSupprimermerci beaucoup ! Votre article est plus crédible et plus historiquement scientifique ! On ne sent pas de tendance trop politique !
RépondreSupprimerquelle role a joué monsieur nkunzumwami à cette époque parce que apparemment il n'était pas loin de la chose;il devrait nous eclaircir sur le poste qu'il occupait comme l'a fait l'ambassadeur ntakibirora tharcisse; ce serait gentil de sa part;merci
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